Le Carnaval de Venise et l'histoire fascinante de ses masques millénaires
Le 05 février 2021
Et ailleurs
Événement majeur de la Sérénissime, le Carnaval de Venise passionne les foules d’Italie et d’ailleurs depuis très - très - longtemps. Masques ultra travaillés et costumes bariolés s’emparent des rues de la cité des amoureux 10 jours avant le mercredi des Cendres et ce, jusqu’à Mardi Gras. Une fête riche de son passé qui ne manque pas, aujourd’hui encore, de nous inspirer pour la réalisation de nos déguisements festifs.
Place San Marco, courant février. Là où les costumes montrent les Hommes et où les masques, au contraire, les cachent. Un haut-lieu de confluences où sonne et résonne un air de fête, et d’où s'élève un murmure d'anonymat. Foule populaire et noblesse s’y mélangent, les langues – affranchies des chaînes imposées par le statut social de leurs propriétaires - se délient et les rôles souvent s’inversent à l’occasion de cet intrigant défilé. De cette tradition vénitienne grondent les intrigues.
Frémissantes, elles se perdent dans le cortège. Simplement parce qu’il n’y a plus ni rang ni titre en ce jour de veille de Carême, où les costumes masquent les identités et libèrent la parole (sauf en cas de port d’une moretta).
Le Carnaval de Venise, un événement séculaire, donc, qui suscite un engouement réel car synonyme de libération de sa condition. C’est aussi, aujourd’hui encore, une formidable occasion de rire et de s’amuser en s’en mettant plein la vue, charmé(e)s par la beauté de la Cité des Doges et l’esthétique léchée des costumes des carnavaliers.
Entre interdits et libertés
Les premières traces d’évocation du Carnaval de Venise remontent à 1094, dans un édit sur les divertissements publics du doge de Venise. Cependant, la première date-clé marquant un tournant dans l’histoire de cette célébration est l’année 1269. Un édit du sénat déclare comme jour férié la veille du Carême, Mardi gras, et autorise le déguisement. Les excès du Carnaval étaient tolérés par le gouvernement. Si de nombreuses lois régissaient ces jours de fête, il s’agissait surtout de limiter les écarts de conduite tels que les jets d’œufs pourris sur certaines demoiselles ou la cruauté envers les animaux, descendance directe de plusieurs fêtes telles que la fête des Maries.
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Le Carnaval de Venise connait son apogée au 18ème siècle. Fête de séduction et de liberté d’expression, le siècle des libertins ne pouvait que profiter à cette célébration ! Les excès populaires sont effacés par la reprise en main du Carnaval par la noblesse. Après 1800, les masques furent progressivement interdits, puis complètement proscrits par Napoléon, au 19ème siècle. En 1980, le Carnaval est officiellement rétabli et devient mondialement célèbre.
Ave Maria
C’est ainsi que, deux samedis avant le Mardi gras, le Carnaval débute par la fête des Marie. Le 2 février, à l’occasion du jour de la purification de Marie, les femmes étaient bénies et 12 filles choisies parmi les plus pauvres et les plus belles de Venise se mariaient au sein de la basilique San Pietro di Castello. Les 12 élues recevaient une dot offerte par la noblesse vénitienne.
Au 10ème siècle, les 12 filles dotées par le doge ont été enlevées par des brigands. Dès lors, la fête des Marie a célébré le retour des douze retrouvées par les Vénitiens.
Si cette célébration, parmi les plus prestigieuses de Venise, a duré 400 ans, elle fut supprimée en 1380. Ce n’est qu’en 1999 qu’elle fut réintroduite au sein de la célébration du Carnaval de Venise. Et depuis, comme à l’époque, les costumes portés par les élues sont exceptionnels et gage de tradition préservée.
Le vol de l'ange et de la Colombe
Puis au premier dimanche du Carnaval, à très exactement midi, l’Ange s’élance du campanile de la place San Marco. À l’origine, un funambule jouait le rôle de l’Ange marchant sur une corde puis descendant jusqu’à la Loggia. Mais en 1759, l’un d’eux a chuté, provoquant une profonde modification de la tradition. Le vol de l’Ange est devenu le vol de la Colombe. Une colombe en bois était alors lancée, lâchant sur la foule fleurs et confettis. Le vol de l’Ange a été restauré en 2001 du fait de l’évolution de l’industrie. Il s’agit aujourd’hui d’un honneur réservé à des personnalités.
Aux origines : la bauta et la moretta
Sur la scène vivante que sont les rues et canaux de la lagune vénète, comme dans le public, chacun est grimé. C’est ainsi qu’il est possible d’en voir arborer une cape noire, un tricorne noir et un masque de céruse blanc, dont la découpe modifie le son de la voix. Vous avez deviné : il s’agit de la bauta ! Certainement l’un des plus célèbres et plus anciens costumes du Carnaval. Portée par les hommes et les femmes, elle a été détournée dans la vie quotidienne à l’égard de rencontre discrète.
La moretta, elle, est un masque de velours noir et rond qui recouvre la moitié du visage. Il était réservé aux femmes et était symbole de séduction et de mystère. Il est tenu en bouche par un bouton empêchant celle qui le portait de parler.
La Commedia dell'Arte : un tournant déterminant
Au fur et à mesure des années, les costumes se sont complexifiés, devenant de plus en plus colorés et représentant des personnages de la Commedia dell’Arte.
Arlequin est, sans l’ombre d’un doute, le plus célèbre d'entre tous. Personnage historiquement pauvre jouant le rôle d'un serviteur, il est une figure emblématique du Carnaval. Son identité s’est quelque peu modifiée devenant symbole de ruse et de pitrerie.
Comparse d’Arlequin, Colombine est l’unique costume féminin de la Commedia dell’Arte. Servante à l’oreille qui traîne, elle est au cœur de ruses et d’intrigues dignes de son compagnon de toujours.
Fanfaron et peureux, le Capitan est aussi l’un des costumes les plus célèbres du Carnaval tiré de la Commedia dell’Arte. Son masque à long nez est un clin d’œil caricatural aux médecins d’époque qui l’utilisaient alors pour se protéger de la peste.
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