Le "fika", pause suédoise en passe de s'imposer parmi les organisateurs d'événements professionnels ?

Le 08 décembre 2022 On en parle

Véritable institution sociale en Suède depuis les années 50, le fika, célèbre pause-café gourmande pour échanger avec des proches ou des collègues, traverse les frontières et gagne du terrain en France. Un doux moment à offrir à ses collaborateurs pour décompresser lors d'un séminaire ou d’une journée de réunion ou de formation hors des bureaux.

“Fika”. Un si petit mot dont l’impact sur la culture suédoise est pourtant très grand. Ce terme est d’ailleurs un des premiers avec lequel les étrangers font connaissance dès leur arrivée en Suède. Car là-bas, il n’y a point de journée réussie sans le traditionnel “fika”. Mené à raison de deux voire trois fois par jour (entre 9 heures et 16 heures), ce rituel est devenu une véritable institution sociale. A tel point que même l’entreprise spécialisée dans la conception et la vente de détail de mobilier et objets de décoration, IKEA, tente de convertir ses clients dans ses magasins installés à l’étranger, à l’aide de nouveaux accessoires pour café. Mais de quoi est-t-il question exactement ? Le concept est plutôt simple : le “fika” est une pause dont l'espace de temps permet de boire un café (le terme vient de “kaffe” en suédois, qui signifie “café” en français, ndlr). Un moment pris dans sa journée en famille, entre amis ou collègues, éventuellement accompagné d'un encas.  

À lire aussi : ABBA fait grimper la fièvre : le groupe suédois en 8 chansons pour danser jusqu'au petit matin

Des échanges sociaux à impact positif 

“Une simple pause-café, donc ?”, vous demandez-vous peut-être ? A cette interrogation (rassurez-vous, il n’y a pas de question bête) les Suédois répondront unanimement “Nej” (non, en français, ndlr) ! Un “fika” est bien plus qu’une pause-café. C’est “un rituel quotidien qui construit et organise la journée des Suédois”, confirme à Madame Figaro, Annelie Jarl, maître de conférences au département d'études nordiques de l'université de Caen. L’occasion de changer d’air, de milieu, de faire une coupure, de s’asseoir entre collègues ou amis, et de discuter de choses et d’autres. Entrée dans la société suédoise dans les années 1950, cette tradition semble plus que jamais contribuer à notre bonheur. “Cette pause nous permet de prendre du recul”, constate Caroline Nobilé, co-fondatrice du café FIKA, installé depuis le mois de septembre au sein de l'Institut suédois à Paris. “On se rappelle quelles sont les priorités dans la vie : être tourné vers l'autre et vers soi”, poursuit-t-elle. 

Rien d'étonnant à cela, puisque par nature, nous avons, depuis la nuit des temps, ce besoin inné de sociabiliser pour nous sentir bien. Pour Christophe Haag, chercheur en psychologie sociale et professeur à l'EM Lyon, ce besoin, aussi anodin soit-il, est autant important que boire ou manger. Il confie d’ailleurs à Madame Figaro qu’“en investissant du temps pour l'autre, avec écoute et gentillesse, on atteint nous-même un état de bien-être et d'apaisement, c'est un effet-miroir. Sans oublier que l'échange social peut permettre de rééquilibrer la balance de ses émotions négatives. L'autre peut être un véritable anxiolytique naturel”, illustre le spécialiste. Le “fika” - faisant partie intégrante du quotidien des Suédois, pourrait ainsi expliquer, selon le spécialiste, qu'à l'échelle nationale, les Suédois se sentent si heureux. D'après le World Happiness Report 2022, la Suède est classée 7e parmi les pays les plus heureux du monde, quand la France occupe la 20e place. “Ils ont une hygiène de vie collective qui les encourage régulièrement à avoir de l'échange social positif avec autrui, et ça, ça fait un bien fou”, commente Christophe Haag. 

La solution pour resserrer les liens entre collègues et rester efficace ? 

La sphère professionnelle n'échappe pas à ce célèbre rituel. Même en entreprise, le “fika” reste un moment intime où la place de chacun dans la hiérarchie importe peu. Sur certains lieux de travail en Suède, il est d’ailleurs très mal vu de sauter un “fika” pour quelque raison que ce soit. Ainsi, si une réunion a lieu à l’heure de cette pause gourmande (le matin vers 9h30-10h ou l’après-midi, vers 15h, ndlr), il est de coutume de prévoir une pause pour aller chercher une tasse de café ou de thé et d’offrir une pâtisserie. Ces petites parenthèses seraient le moyen idéal d'être plus efficace tout au long de la journée. “Le cerveau humain a besoin de parler d'autre chose pour prendre de la hauteur sur sa tâche en cours, rebondit Christophe Haag. Sans oublier que l'humour active des zones du cerveau qui produisent des pensées créatives et adaptatives, ce qui booste notre capacité à résoudre un problème pourtant sérieux”. De quoi donner à l'employé un regard neuf après chaque pause-café, tout en faisant baisser son taux de cortisol (l'hormone du stress, ndlr), conclut Christophe Haag. 

Vous êtes soucieux du bien-être de vos collaborateurs ? Ce rituel pourrait alors valoir la peine d'être essayé. Surtout si l'on en croit le dernier sondage Gallup, sur le bien-être des employés dans le monde. 72 % des Suédois estiment leur vie épanouissante, contre 43 % des Français. D'après le même rapport, 36 % des Suédois se disent stressés au travail, contre 44 % par chez nous. 

Faire une place au fika durant les rassemblements pros 

Vous l’avez compris, le “fika”  est une pause. Une (vraie) coupure dans la journée. L’important est donc que vos collaborateurs se sentent à l’aise pour vivre ce moment pleinement. Saviez-vous qu’en Suède, certaines entreprises ont même des pièces dédiées au “fika”, où l’atmosphère est idéale ? Ainsi, si vous envisagez d’organiser un séminaire, une journée d’étude, une réunion ou un moment de team building en dehors de vos bureaux, choisissez de préférence un établissement calme, dans une ambiance “cozy”, joliment décoré et sans lumière trop agressive, à l’instar des lieux d’exception où se déroulent généralement cocktails et autres rassemblements corporatifs. 

Par ailleurs, qui dit pause dit aussi café. Pas étonnant que cette boisson soit au cœur du menu, puisque la Suède est un des pays qui en consomme le plus au monde (environ 7 kg par an, selon les chiffres de Statista, ndlr). Proposez-donc à vos collègues de travail, un café, idéalement de qualité supérieure. Mais le thé peut également être de la partie. Il n’est plus rare non plus de servir des “chai latte” ou des “matcha latte”. Avec ceci ? Une pâtisserie, s’il vous plaît ! La star des “fika” en Suède est généralement le “kanelbullar”, un petit gâteau moelleux à la cannelle. Mais il y a aussi les “kardemummabullar” (les mêmes brioches à la cardamome), le “kladdkaka” (gâteau au chocolat au cœur mi-cuit, éventuellement accompagné de crème fouettée) ou le “morotskaka” (gâteau aux carottes). Enfin, n’oubliez pas qu’il n’est pas rare de prendre plusieurs “fika” par jour : maximum deux par journée de travail, plus précisément. Et pourquoi pas à l’occasion d’un afterwork, pour décompresser comme il se doit en bonne compagnie ? 

Vous avez déjà instauré des “fika” durant vos rassemblements corporatifs ? Partagez-nous vos témoignages en commentaire sur Facebook, ou par le biais de notre formulaire de contact !