Les lieux de fête à travers les âges : les espaces de convivialité d'hier à aujourd'hui

Le 27 septembre 2022 Bonnes adresses

Peu importe la région du monde où l’on se trouve : festoyer est universel et intemporel. Un besoin presque inné de célébrer en famille, entre collègues ou entre amis, les temps forts de nos vies. Et si nous vous disions que l’envie de se réunir dans un cadre particulier ne datait pas d’hier ?

Nos ancêtres forts lointains festoyaient-ils déjà ? Tout porte à croire que oui, et il n’y a rien d’étonnant à cela. Car la fête est ce que l’on appelle, en anthropologie, un “invariant”, c’est-à-dire, “une caractéristique commune à toutes les sociétés humaines”, nous explique Laurent-Sébastien Fournier, professeur d’anthropologie à l’université d’Aix-Marseille (Bouches-du-Rhône) et auteur de l’ouvrage Anthropologie de la modernité. Depuis (presque) toujours, nous accordons une grande importance à la fête. Et pour cause, celle-ci participe à notre bien-être au quotidien. Pour de grandes occasions ou simplement pour célébrer les petits moments de la vie, nous adorons retrouver celles et ceux qui nous sont chers, le temps d’une journée, d’une soirée ou d’un week-end.  

"Atypique", "originalité", "insolite"... Ces mots sont désormais dans toutes les bouches et connaissent également un grand succès dans le monde de l'événementiel ! Mais pour quelle raison cette nouvelle tendance a-t-elle autant de succès chez les organisateurs d'événements ? Simplement parce que la réussite de nos rassemblements passe souvent par le choix d’un établissement. S’offrir une bulle de détente, une journée de dépaysement en pleine nature ou simplement surprendre ses invités en les conviant dans un cadre hors du commun... Louer une salle semble aujourd’hui être devenu une norme pour beaucoup, et l’un des ingrédients clé pour garantir la réussite de tous nos événements festifs privés comme professionnels. Mais cela a-t-il toujours été ainsi ?   

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Se réunir pour marquer les temps forts de l’année 

Nous avons, depuis la nuit des temps, toujours souhaité nous rassembler pour célébrer les moments importants de l’année. À partir de l’invention du calendrier, en Mésopotamie et en Égypte antique par exemple, les fêtes calendaires (liées au cycle des saisons) permettaient aux Hommes de s’ancrer dans leur environnement, rapporte Ça M’intéresse. Par ailleurs, saviez-vous qu’en France il existait déjà, à l’époque, des espaces exclusivement réservés aux temps festifs, comme c’est le cas aujourd’hui ? “Au Moyen-âge, les fêtes religieuses se déroulaient dans les cathédrales. Les célébrations populaires, plus intimistes, se produisaient souvent dans les foyers, la cour d’une ferme pouvant devenir lieu de célébration à l’occasion de la fin d’une moisson, par exemple. L’esprit de fête pouvait même avoir lieu dans une chambre à coucher, à l’occasion d’une naissance”, affirme Laurent-Sébastien Fournier. 

Les rendez-vous annuels rythmaient donc la plupart du temps les moments de célébrations de la société, qui, le plus souvent, avaient lieu au sein des maisons privées. Même si, parfois, il était de coutume de “faire la fête dans des lieux marginaux, en dehors de l’espace commun : dans une plaine à la frontière du terroir, au bord d’une rivière, dans la forêt...”, précise l’anthropologue.  

Des célébrations autrefois réservées à une élite  

Pour comprendre comment l’utilisation de certains établissements (villas, domaines, châteaux, lofts, etc.) a évolué, passant de demeures dans lesquelles vivre à des lieux à privatiser le temps d’événements ponctuels, il semble important de dresser un petit état des lieux de l’évolution du rassemblement festif d’hier à aujourd’hui. Il faut d’abord savoir qu’à l’époque du Moyen âge, les “gens du peuple” faisaient généralement la fête avec les moyens du bord (c’est à dire, avec pas grand-chose). “Les bourgeois, quant à eux, avaient la possibilité d’employer de plus grands moyens et organisaient ainsi des événements de grande envergure, très élitistes. Il pouvait arriver que le Seigneur invite des gens du peuple à ses fêtes, mais uniquement pour se faire bien voir et asseoir son pouvoir”, explique Laurent-Sébastien Fournier. 

A noter qu’au fil du temps, les différents exodes ruraux ont, d’une manière ou d’une autre, contribué à transformer la vision que les Français avaient - et ont aujourd'hui - de faire la fête. “De nouvelles célébrations ont été inventées dans les villes, comme le bal du 14 Juillet, par exemple.” Mais les rassemblements ruraux n’avaient toujours pas dit leurs derniers mots, puisqu’ “à partir de 1970, de manière inattendue, il y a eu une recrudescence des fêtes rurales. Les populations étaient nostalgiques et ont réinventé la tradition. C’est ainsi que les fêtes visant à revaloriser les produits du terroir ont vu le jour (fête de la châtaigne, fête de l’olive, etc.)”. Un phénomène que l’on peut d'ailleurs toujours observer de nos jours. 

Une manière différente de concevoir la fête ?  

Durant les célébrations traditionnelles de l’époque, il était déjà question de se réunir en comité. Depuis, les choses n’ont visiblement pas vraiment changé. Pour Laurent-Sébastien Fournier, privatiser un établissement est une façon de se distinguer du reste de la population. “On délimite un espace rien que pour nous. C'est une manière de créer de la différence, de se construire un lieu de privilège pour une occasion spéciale.”  

Réceptions de mariage, fêtes d’anniversaire, baby showers, cousinades, vernissages, soirées de “réseautage”... Les raisons de se rassembler, en nombre parfois, semblent plus nombreuses que jamais. Et pourtant, nous ne festoyons plus exactement de la même manière. A cela une explication : “les occasions de faire la fête se sont multipliées et font partie de notre quotidien. Alors qu’au Moyen-Age, il s’agissait de quelque chose d’assez exceptionnel”. Les célébrations ont donc évolué avec le temps, tout comme le nombre de nos invités, la durée de nos temps forts et notre rapport à la musique. En effet, si, à l’époque, le “live” était de tous les rassemblements (par le biais d’orchestre de chambre et autres quartets, ndlr), de nos jours, nous privilégions les DJ ou encore les playlists communes pour animer nos rassemblements.  

Privatiser un lieu pour faire la fête, essentiel ou pas ?   

Depuis le début de la crise sanitaire liée à la Covid-19, notre rapport à la fête a radicalement changé. Il semble alors se dégager deux grandes tendances : les rassemblements intimistes d’une part, et ceux de grande envergure d’autre part. En bref, nous avons dû adapter aussi bien notre manière de nous rassembler, que le choix des lieux au sein desquels nous festoyons. Mais, finalement, “la fête, elle, est restée ce qu’elle est : un moment de joie. Certes, peut-être pas “essentielle” du strict point de vue utilitaire, mais un concept important qui nous différencie de l’animalité. Un instant de ritualisation, aux fonctions à la fois sociales, politiques et symboliques”. 

Depuis la pandémie, nous nous sommes ainsi souvenus de l’importance de nous réunir dans un lieu privilégié et chaleureux, à la fois lors de fêtes ponctuelles, “mais aussi à l’occasion de toutes celles qui rythment l’année, comme les anniversaires, les mariages et même les enterrements !”, précise Laurent-Sébastien Fournier. Ce qu'il faudrait donc retenir, c’est qu’il n’y a pas vraiment eu un simple processus linéaire, mais plutôt “des avancées et des reculs constants”.  

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