Violences sexistes et sexuelles en festivals : quels enseignements pour les organisateurs d’événements festifs ?
Le 08 juillet 2025
On en parle
En 2023, une enquête sociologique menée par Marylène Stourm et le Collectif des festivals bretons a levé le voile sur une réalité trop souvent tue : les violences sexistes et sexuelles en milieu festif. Si cette étude se concentre sur les festivals, ses enseignements dépassent largement ce cadre. Mariages, séminaires, soirées d’entreprise ou étudiantes, anniversaires : les rassemblements privés et professionnels ne sont pas épargnés.

“Si elle veut pas, GHB, GHB !” “C’était au concert de [chanteuse de pop étrangère]. Il y avait un groupe de mecs derrière. [Ils criaient] genre “couche avec moi !” “vas-y déshabille-toi”. Bref, je vais pas tous les faire. [...] Il y en a eu plein, c’était horrible.” Camille, 23 ans, festivalière. L’été bat son plein, et avec lui, le cortège des festivals, concerts et autres rassemblements festifs. Sous les projecteurs, la musique fait vibrer les corps. Mais dans les coulisses, une autre réalité se dessine : celle des violences sexistes et sexuelles. Un fléau que le milieu culturel a enfin décidé de regarder en face, grâce à une enquête sociologique menée par le Collectif des festivals et la sociologue Marylène Stourm.
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Si les résultats concernent les festivals bretons, les enseignements qu’on peut en tirer s’adressent à tous les organisateurs d’événements, y compris dans le secteur privé. Mariages, séminaires, soirées d'entreprise ou estudiantines, anniversaires ne sont pas à l’abri de comportements déplacés. Et si le cadre est plus restreint, l’exposition, elle, reste bien réelle.
Une violence ordinaire mais invisibilisée
L’étude menée auprès de 1500 festivaliers révèle que 1 femme sur 2 déclare avoir déjà été victime de violences sexistes ou sexuelles dans un cadre festif. Remarques graveleuses, gestes déplacés, tentatives d’agression : les faits sont banalisés, minimisés, rarement signalés. Chez les hommes, le chiffre chute drastiquement (seulement 11 % se disent victimes), preuve d’un déséquilibre massif.
Parmi les situations les plus citées :
- Les propositions sexuelles non sollicitées (33 %)
- Les attouchements dans la foule ou sur les pistes de danse (25 %)
- Les regards insistants, commentaires sur le corps, voire les insultes (près de 40 %)
Et surtout, 80 % des femmes interrogées déclarent avoir mis en place des stratégies d’évitement ou de protection, comme changer de tenue, éviter certains endroits, ou rester en groupe. Mais au-delà des actes eux-mêmes, l’enquête met en lumière les stratégies de protection que doivent adopter les femmes pour éviter d’être importunées : se déplacer en groupe, se méfier de certains espaces, réfléchir à leurs tenues, éviter certaines interactions...
Ce que cette enquête révèle, c’est donc un climat d’insécurité larvée qui pousse une partie du public à se restreindre dans ses mouvements, dans son apparence ou même dans sa manière de profiter de l’événement. Or, ce sentiment peut tout à fait exister dans des événements privés, où les dynamiques sociales (hiérarchie professionnelle, pressions familiales, proximité alcoolisée) peuvent aussi favoriser des abus.
Si les festivals, par leur ampleur, ont rendu visible un problème systémique, ils ont aussi ouvert la voie à des solutions. À charge maintenant pour les acteurs de l’événementiel privé de s’en inspirer.
Que faire ? Des dispositifs concrets à adapter dans le privé
L’une des manières de prévenir ces dérives pourraient être la mise en place progressive de dispositifs concrets : “safe zones”, maraudes, formations pour le personnel, communication affichée sur les lieux. Ces mesures, bien qu’encore imparfaites, ont le mérite d’exister et de structurer une réponse collective.
Dans les événements privés, rien n’empêche d’intégrer certaines de ces pratiques : prévoir un espace de repli, même informel, où une personne peut se sentir en sécurité ; sensibiliser les membres de l’équipe d’organisation (ou les témoins, les managers, les traiteurs) à l’accueil d’une parole ; désigner une personne de confiance prête à être sollicitée ; ou encore afficher clairement une politique de tolérance zéro en amont. Ces quelques gestes simples peuvent créer un climat où chacun se sent responsable et protégé.
Changer de culture : une responsabilité partagée
Mettre en place des dispositifs est une première étape. Mais comme le souligne l’enquête, ils ne suffisent pas toujours : encore faut-il qu’ils soient visibles, bien expliqués, et portés par une véritable volonté de changement. Dans le privé, cette responsabilité repose sur les organisateurs eux-mêmes : couples qui se marient, chefs d’entreprise, agences d’événements, lieux de réception.
Changer de culture, c’est aussi déconstruire des idées reçues : non, ce n’est pas "moins grave" parce qu’on est entre amis ou entre collègues ; non, l’alcool ne doit pas servir d’excuse ; non, la responsabilité n’incombe pas à la victime. C’est en assumant cette posture que les organisateurs privés peuvent devenir des relais de bonnes pratiques.
Pour tirer des leçons concrètes de cette problématique, il faut reconnaître que chaque lieu, chaque soirée, chaque événement peut être concerné. Et qu’il est possible, même à petite échelle, de proposer une fête où chacun se sent en sécurité, respecté, libre d’être soi.
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